L’univers du numérique en santé évolue à grande vitesse. Parmi les nouveautés majeures figure le dispositif PECAN — un mécanisme de prise en charge anticipée par l’Assurance Maladie de solutions numériques de santé innovantes (dispositifs médicaux numériques à visée thérapeutique ou de télésurveillance) avant qu’elles ne soient inscrites dans le droit commun. Ce dispositif, entré en vigueur suite au décret n° 2023‑232 du 30 mars 2023, ouvre de nouvelles opportunités… mais suscite aussi des interrogations, notamment pour les cabinets médicaux libéraux. Que doivent savoir les médecins ? Quels impacts concrets pour le cabinet ? Suivez le guide.
Qu’est‑ce que le dispositif PECAN ?
Origine, objectifs et contexte réglementaire
Le décret du 30 mars 2023 a introduit la prise en charge anticipée des dispositifs médicaux numériques (DMN) à visée thérapeutique ou de télésurveillance.
L’objectif : permettre aux solutions numériques innovantes, ne bénéficiant pas encore d’un remboursement de droit commun, d’être prises en charge pendant 12 mois par l’Assurance Maladie.
Par ce biais, la France souhaite accélérer l’accès des patients à l’innovation numérique tout en soutenant l’engagement des professionnels dans la transformation numérique.
Champ d’application et principes clés
- Sont visés : les DMN à visée thérapeutique (« DTx ») et les activités de télésurveillance médicale.
- Durée de la prise en charge : une année maximum, non renouvelable, à titre dérogatoire.
- Conditions : marquage CE, caractère présumé innovant (bénéfice clinique ou progrès organisationnel), conformité aux référentiels d’interopérabilité et sécurité.
- Dispositif transitoire : à l’issue de l’année PECAN, il faudra déposer une demande d’inscription « de droit commun » (LPPR ou LATM selon le cas).
Pourquoi un cabinet médical devrait‑il s’y intéresser ?
Impact sur vos patients et votre offre de soins
Même s’il s’agit d’un dispositif ciblant principalement les fabricants et prestataires de solutions numériques, les cabinets peuvent tirer partie des innovations accélérées par PECAN :
- Des solutions numériques innovantes (DTx, télésurveillance) deviennent plus rapidement disponibles pour prescription ou intégration dans le parcours patient.
- Le cabinet peut proposer des dispositifs connectés que les patients ont accès via remboursement ou prise en charge plus rapide.
- L’innovation numérique devient un levier différenciant : pratique plus performante, suivi renforcé des patients chroniques, amélioration de la qualité de service.
Opportunités pour les médecins libéraux et les cabinets
- Être acteur de la transformation numérique : en adoptant tôt des solutions numériques innovantes, le cabinet se positionne à la pointe.
- Valoriser la prise en charge des pathologies chroniques via télésurveillance ou DTx : grâce à l’accélération du marché, de nouveaux outils deviennent accessibles.
- Améliorer l’organisation du cabinet : dispositifs numériques qui optimisent le suivi, réduisent la charge administrative, améliorent la coordination soins‑patient.
Ce que le cabinet doit surveiller
- Vérifier la qualité et la conformité des solutions (interopérabilité, sécurité, compatibilité avec DMP, messagerie sécurisée).
- Être informé de la prescription, du remboursement, des modalités de facturation pour les patients.
- Anticiper l’intégration dans les process internes du cabinet (flux de données, collaboration avec les éditeurs, formation des équipes).
Les modalités pratiques à connaître
Critères d’éligibilité des solutions
Pour qu’une solution soit éligible à PECAN :
- Marquage CE dans l’indication revendiquée.
- Présomption d’innovation : bénéfice clinique ou progrès dans l’organisation des soins.
- Conformité aux référentiels de sécurité et d’interopérabilité de l’Agence du Numérique en Santé (ANS).
Fonctionnement et calendrier
- L’exploitant soumet simultanément à l’ANS (plateforme Convergence) et à la Haute Autorité de Santé (plateforme Sésame) sa demande.
- Décision de PECAN : dans un délai visé de 90 jours.
- Après accord : l’exploitant doit, dans 6 mois (DTx) ou 9 mois (télésurveillance), déposer la demande de prise en charge de droit commun.
Remboursement et compensation
- Selon l’arrêté du 22 avril 2024 : forfait initial de 435 € TTC pour les 3 premiers mois, puis 38,3 € TTC/mois à partir du 4ᵉ mois, jusqu’à un plafond de 780 € TTC/an par patient.
- À noter : ce sont les exploitants des solutions qui sont remboursés, mais la disponibilité de ces outils impacte le cabinet.
Implications pour le cabinet médical : checklist et bonnes pratiques
Étape 1 : identifier les solutions pertinentes
- Vérifier si des DTx ou dispositifs de télésurveillance sont éligibles via PECAN.
- S’intéresser aux pathologies couvertes (chroniques, suivis à distance) et aux bénéfices pour vos patients.
- Questionner l’éditeur sur la conformité (interopérabilité, données, sécurité).
Étape 2 : intégrer la solution dans votre organisation
- Prévoir la formation des équipes (médecins, infirmiers, secrétariat) à la nouvelle solution.
- Adapter le parcours patient : information, consentement, suivi, coordination.
- Mettre en place les flux de données : vers DMP, messagerie sécurisée, logiciel métier.
Étape 3 : capitaliser sur l’innovation
- Communiquer auprès des patients : « Nouvel outil pris en charge via PECAN ».
- Suivre l’impact : indicateurs de suivi, satisfaction, réduction de charge.
- Anticiper la pérennité : s’assurer que la solution pourra passer de PECAN à droit commun.
Points de vigilance et défis à relever
- Le dispositif PECAN ne remplace pas la prise en charge de droit commun : il s’agit d’une phase transitoire. Si la solution ne parvient pas à répondre aux exigences ou à obtenir l’inscription LPPR/LATM, le financement peut ne pas être renouvelé.
- Le cabinet doit s’assurer que les conditions de remboursement au patient sont bien claires : coût, prise en charge, rôle de la solution dans le suivi.
- L’intégration technique peut se heurter à des contraintes d’interopérabilité, de sécurité des données, de gestion des flux.
- Risque de sur‑communication utilisateur : ne pas présenter une solution numérique comme miracle sans clarifier la réalité des bénéfices et limites.
Le dispositif PECAN marque une nouvelle ère pour l’innovation numérique en santé en France. Pour les cabinets médicaux, même s’il concerne en premier lieu les innovateurs et les éditeurs, il constitue un levier concret pour enrichir l’offre de soins, accélérer l’adoption des outils numériques et se différencier dans un environnement libéral concurrentiel. En adoptant une démarche proactive — identification des solutions, adaptation organisationnelle, suivi des résultats — le cabinet peut tirer le meilleur parti de cette opportunité. Restez vigilant sur les contraintes, et positionnez‑vous dès maintenant dans cette nouvelle dynamique.
FAQ
- Mon cabinet peut‑il directement déposer une demande PECAN ?
- Non ; la demande PECAN est déposée par l’exploitant du dispositif numérique (éditeur ou fournisseur). Le rôle du cabinet est d’identifier et utiliser des solutions déjà retenues ou éligibles via PECAN.
- Quels critères pour qu’un patient bénéficie d’une solution via PECAN ?
- Le patient doit être suivi par un professionnel habilité, l’indication doit être validée, et la solution inscrite dans la prise en charge anticipée. Le médecin doit l’intégrer dans le parcours de soins.
- Que se passe‑t‑il après la période d’un an de PECAN ?
- L’éditeur doit déposer une demande d’inscription dans le droit commun (LPPR ou LATM). Si l’inscription est validée, la solution reste remboursée. Sinon, un sursis limité peut s’appliquer, mais la pérennité n’est pas automatique.
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