Une nouvelle ère pour l’évaluation des DMN ?
Le 11 juin 2025, à l’ambassade d’Allemagne à Paris, un accord a été signé entre la France et l’Allemagne, visant à créer une synergie sans précédent dans l’évaluation des dispositifs médicaux numériques (DMN). Cette coopération, portée par la Haute Autorité de Santé (HAS), le BfArM (Institut fédéral allemand des médicaments et des dispositifs médicaux) et les ministères de la Santé des deux pays, marque une étape forte vers une évaluation partagée de ces outils en pleine expansion.
Pourquoi est-ce important ? Parce qu’à l’heure où les DMN occupent une place croissante dans les pratiques médicales, leur évaluation reste morcelée, lente, et parfois déconnectée des réalités du terrain. Cet accord pourrait changer la donne.
1. Une coopération née d’un constat partagé
Depuis plusieurs années, la France et l’Allemagne développent, chacune de leur côté, des processus d’évaluation pour accompagner le déploiement des DMN. La France a lancé PECAN, un cadre de prise en charge anticipée des DMN à visée thérapeutique. L’Allemagne, elle, s’est dotée du système DiGA, qui permet l’inscription rapide de certaines applications dans la liste des dispositifs remboursables.
Mais rapidement, un besoin s’est imposé : éviter les doublons, partager les retours d’expérience, et tendre vers une reconnaissance mutuelle des évaluations. C’est dans cet esprit qu’est née la coopération franco‑allemande.
2. Ce que prévoit l’accord (2025–2026)
Cet accord, présenté comme une "lettre d’intention", lance plusieurs actions concrètes :
- Organisation d’ateliers bilatéraux réunissant ministères, agences et experts pour partager méthodes, outils et retours d’expérience.
- Immersion croisée des experts de la HAS et du BfArM dans les dispositifs d’évaluation de chaque pays.
- Publication d’un article scientifique commun présentant les approches respectives et les convergences possibles.
- Bilan de la coopération prévu fin 2026, avec une perspective d’élargissement à d’autres États membres.
L’objectif à court terme ? Structurer une méthodologie partagée, non contraignante mais inspirante, pour accompagner les industriels et sécuriser les usages cliniques.
3. Quels impacts pour les acteurs français ?
➤ Pour les professionnels de santé
L’arrivée de DMN évalués via une grille commune franco‑allemande, centrée sur l’efficacité clinique et la sécurité, va renforcer la lisibilité de ces outils. Pour les prescripteurs, cela signifie moins d’incertitude, plus de confiance.
➤ Pour les industriels
Une convergence des critères permettrait de réduire les délais de mise sur le marché européen, tout en évitant des coûts d’évaluation en doublon. Cela ouvre la voie à une stratégie de déploiement plus fluide et plus rapide.
➤ Pour le système de santé
L’harmonisation participe à une évaluation plus rapide, plus fiable et potentiellement moins coûteuse, au service d’un meilleur accès des patients à l’innovation.
4. Un premier pas vers un espace européen de l’évaluation
Ce partenariat s’inscrit dans un mouvement plus large porté par l’Union Européenne, qui cherche à créer un cadre commun pour l’évaluation des technologies de santé numériques. La taskforce européenne lancée en 2022 travaille déjà à des standards communs.
Cette initiative bilatérale France‑Allemagne fait figure de laboratoire, avec l’espoir de poser les bases d’un futur label d’évaluation européen des DMN, en complément du règlement EHDS sur les données de santé.
5. Des limites à ne pas ignorer
Attention, cette coopération ne signifie pas encore reconnaissance mutuelle automatique. Il ne s’agit pas d’un alignement réglementaire strict, mais d’une volonté de dialogue et de convergence.
D’autre part, la réussite du projet dépendra de :
- La continuité politique au-delà de 2026,
- La capacité à engager les industriels dans le processus,
- La prise en compte des retours cliniques, essentiels à toute évaluation crédible.
Conclusion
L’accord signé entre la France et l’Allemagne constitue un tournant stratégique pour le numérique en santé. Il reflète une volonté claire de mutualiser les savoirs, d’aligner les procédures, et de préparer une évaluation plus simple, plus rapide et plus sécurisée des DMN en Europe.
Reste à transformer l’essai, en montrant que cette coopération peut déboucher sur des outils réellement plus accessibles, plus fiables, et mieux intégrés dans les pratiques médicales.
FAQ
Qu’est-ce qu’un dispositif médical numérique (DMN) ?
Un logiciel ou une application numérique ayant une visée thérapeutique, diagnostique ou de suivi clinique.
Pourquoi harmoniser les évaluations entre la France et l’Allemagne ?
Pour éviter les doublons, faciliter l’accès au marché européen et sécuriser les pratiques.
Cet accord remplace-t-il PECAN ou DiGA ?
Non. Il s’agit d’une coopération complémentaire pour rapprocher les méthodologies, sans supprimer les procédures nationales.
Quels bénéfices pour les médecins ?
Plus de clarté sur les DMN disponibles, une confiance accrue dans les outils validés, et un accès facilité à des innovations thérapeutiques.
Et pour les industriels ?
Un gain de temps, de lisibilité et de potentiel d’accès au marché binational — voire européen à moyen terme.



