Introduction
L’intelligence artificielle bouleverse peu à peu les pratiques médicales. Pour structurer son développement, la France a lancé le 1er juillet 2025 une stratégie nationale ambitieuse, articulée autour de deux piliers : l’utilisation secondaire des données de santé et l’IA au service des soins. Cette feuille de route vise à encadrer, encourager et sécuriser les usages de l’IA dans un esprit de souveraineté et d’éthique. Mais que contient-elle concrètement ? Et quelles implications pour les professionnels de santé sur le terrain ? Décryptage.
1. Deux volets pour structurer l’IA médicale française
1.1 L’exploitation des données de santé pour accélérer l’innovation
La première brique de cette stratégie concerne la réutilisation des données de santé, avec dix objectifs concrets annoncés. Parmi eux : le renforcement de l’accès aux données du Système National des Données de Santé (SNDS), via un hébergement souverain sécurisé dont la mise en service est prévue à l’été 2026. Pour assurer une gouvernance transparente, un Forum national rassemblant professionnels, patients, chercheurs et industriels a été créé. L’objectif est clair : faire de la donnée un levier structurant d’innovation, au bénéfice direct du soin et de la recherche.
1.2 L’IA appliquée à la santé : priorités et expérimentation
Le second pilier de la stratégie, ouvert à consultation publique jusqu’au 22 septembre 2025, ambitionne de cadrer le développement et l’usage des technologies IA en santé. Quatre priorités ont été posées : clarifier le cadre réglementaire, renforcer l’évaluation des solutions, accompagner les professionnels et garantir un modèle économique viable. Deux appels à manifestation d’intérêt ont déjà été lancés pour tester l’IA sur le terrain, notamment dans les services d’urgence et dans l’optimisation du temps de travail en établissements médico-sociaux. Les expérimentations commenceront dès septembre 2025.
2. L’état des lieux de l’IA en santé : socle stratégique
Avant ce plan, le ministère avait publié en février 2025 un état des lieux complet de l’IA en santé. Ce document souligne les avancées mais aussi les blocages : manque de données accessibles, formation insuffisante, évaluation inégale des solutions existantes. Il pose aussi les bases d’une stratégie éthique et durable, appelant à renforcer la transparence des algorithmes, former les soignants et construire des outils adaptés aux réalités de terrain.
Ce socle a nourri la stratégie actuelle et reste une référence pour les professionnels qui souhaitent anticiper les évolutions à venir.
3. Quels impacts pour les professionnels de santé ?
Cette stratégie n’est pas réservée aux décideurs publics. Elle s’adresse directement aux professionnels, libéraux comme hospitaliers. Dès la rentrée, ils seront invités à participer aux expérimentations d’outils IA dans leurs services. Des sessions de formation spécifiques seront mises en place pour permettre une compréhension critique des outils, de leurs biais potentiels et de leur intégration dans la pratique clinique.
Au-delà des usages, cette stratégie appelle à une transformation des mentalités : l’IA n’est plus un gadget technologique, mais un partenaire potentiel dans le suivi des patients, l’aide au diagnostic, l’organisation des soins. Encore faut-il que les professionnels soient écoutés, formés et accompagnés dans cette transition.
4. Un cadre éthique et souverain en construction
L’un des éléments clés de la stratégie est le respect de l’éthique. L’Agence du Numérique en Santé et la Direction du Numérique en Santé ont mis en place une concertation publique pour définir les règles du jeu. À l’automne, un guide d’usage éthique de l’IA sera publié. Parallèlement, la création de l’INESIA — Institut national pour l’évaluation et la sécurité de l’IA — permettra de garantir la robustesse et la fiabilité des outils déployés dans le système de soins.
Cette démarche s’inscrit dans une volonté de souveraineté technologique : infrastructures souveraines, standards ouverts, formation de 100 000 professionnels par an à l’IA prévue dans le plan France 2030. L’objectif est de construire une IA de confiance, adaptée à la réalité médicale française.
5. Ce qu’il faut surveiller d’ici 2026
Les mois à venir seront décisifs. Plusieurs jalons sont déjà fixés :
- Septembre 2025 : lancement des expérimentations IA en établissements.
- Fin septembre 2025 : synthèse officielle de la consultation publique.
- Été 2026 : activation de l’hébergement souverain du SNDS.
- Rentrée 2025–2026 : généralisation des premières formations IA pour les soignants.
C’est une période charnière, qui nécessite vigilance, implication, et capacité d’adaptation des professionnels comme des institutions.
Conclusion
La France avance résolument vers une intégration encadrée, éthique et souveraine de l’intelligence artificielle en santé. La stratégie annoncée en juillet 2025 pose des bases solides, mais c’est sa mise en œuvre — sur le terrain, dans les cabinets et les hôpitaux — qui en déterminera le véritable impact. Pour les professionnels de santé, cette transition est à la fois une opportunité et un défi. Il est temps de s’informer, de participer et de se former à cette nouvelle ère du soin.
FAQ
Qui est concerné par cette stratégie ?
- Tous les acteurs du système de santé : médecins, pharmaciens, infirmiers, établissements, chercheurs, industriels, patients.
Quand les premières mesures seront-elles effectives ?
- Les expérimentations démarrent en septembre 2025. Le guide éthique est prévu pour fin 2025. Le SNDS souverain sera activé à l’été 2026.
Quel intérêt concret pour les praticiens libéraux ?
- Un meilleur accès aux innovations, une participation active aux expérimentations, et des outils IA testés, encadrés, sécurisés. Des formations ciblées seront aussi proposées pour accompagner cette évolution.
